Partager son deuil

Catherine-Emmanuelle Delisle aide les femmes sans enfant par circonstances à sortir de leur isolement et à détruire les tabous qui persistent.

Son vécu l’a menée, en 2012, à débuter un blogue pour discuter de cet enjeu qui touche de nombreuses femmes. De fil en aiguille, elle est devenue thérapeute en relation d’aide puis ambassadrice pour la World Childless Week (La Semaine mondiale des sans enfant par circonstances de la vie).

Cette semaine de sensibilisation, de partage et d’écoute entre femmes et hommes sans enfant par circonstances aura lieu du 16 au 22 septembre prochains. Mme Delisle, une enseignante de Saint-Bruno-de-Montarville, est la seule ambassadrice francophone de cette initiative mondiale. Elle animera quelques entrevues durant l’évènement, dont une sur les bouleversements dans l’amitié.

Sortir de son isolement

Ayant reçu, à 14 ans, le diagnostic d’une ménopause précoce inexpliquée, elle a dû faire face au deuil de la maternité très jeune.

À l’inverse des femmes et des hommes qui choisissent de renoncer à la parentalité pour des raisons personnelles, les personnes sans enfant par circonstances en font le deuil en raison d’une situation externe, telle une condition médicale, mentale, physique, ou parce qu’elles n’ont pas rencontré la bonne personne au bon moment, ou à cause d’antécédents familiaux, pour ne nommer que quelques exemples expliqués par Mme Delisle. 

Les conférenciers prendront la parole sous une thématique différente chaque jour. Le premier jour, les participants entendront des témoignages. Pour Catherine-Emmanuelle, cette thématique, qui revient chaque année, est la base pour se réapproprier son vécu.

« Quand on trouve le courage d’en parler à quelqu’un, c’est le premier pas pour sortir de son isolement. Ce qui accompagne ce deuil, c’est la honte. La honte d’être différente, celle de ne pas pouvoir procréer comme les autres femmes. On peut se sentir moins femme aussi », explique Mme Delisle. 

Choisir ses amis

Lors de la World Childless Week, une journée est dédiée aux personnes de couleur. « C’est un autre gros tabou. Ce que j’entends des femmes de couleur qui vivent cette réalité, parce que je n’en suis pas une, c’est qu’elles vivent encore plus de pression de procréer. »

La présence des animaux de compagnie et l’amitié seront au cœur des discussions. Catherine-Emmanuelle Delisle a perdu des amitiés, mais elle a su tisser des liens à travers les années et son deuil. « Mon cercle est principalement composé de personnes choisies. Ce sont des personnes respectueuses de mon chemin de vie, qui ne banalisent pas ma réalité d’une femme célibataire sans enfant », confie celle qui a vu ses amitiés changer, surtout vers la trentaine.

Commentaires irritants

Cette année, comme tous les ans, une journée est consacrée à décortiquer un commentaire désagréable, banalisé et véhiculé dans la société. « Pas d’enfant, veux-tu les miens? » est une question souvent posée aux personnes sans enfant. « Ce genre de commentaires viennent banaliser le vécu de la personne. Ça devient lassant, irritant et blessant, à la longue, de toujours se faire dire que notre vécu est moins important ou difficile à traverser que celui des mères », précise Mme Delisle.

Les deux autres journées sont consacrées à célébrer la valeur de ces hommes et de ces femmes, puis à se projeter dans l’avenir.

Besoin d’écoute

L’évènement, mis sur pied en 2017 par Stephanie Joy Phillips, a pour but de créer un espace de rencontres, de discussions et de partages sur le sujet. « Le deuil, c’est tellement quelque chose d’inconfortable à aborder, mais c’est essentiel d’en parler pour passer à travers. Parler de son deuil est l’étape la plus difficile à poser et celle qui demande le plus de courage. »

Selon la thérapeute en relation d’aide, « ce dont les femmes ont besoin, c’est de l’écoute, de l’empathie et surtout de ne pas être jugées. Elles n’ont pas besoin de conseils ou des questions intrusives ».