L’éducation sexuelle chez les 0-5 ans : éviter le tabou 

La sexologue et psychothérapeute Virginie Lavoie-Dugré, basée à Saint-Bruno-de-Montarville, nous parle de l’importance de penser à l’éducation sexuelle de son enfant dès son plus jeune âge. 

Pratiquant la sexothérapie et la psychothérapie auprès d’une clientèle adulte depuis plus de 10 ans, Virginie Lavoie-Dugré se découvre un intérêt particulier pour l’accompagnement des parents sur le plan de l’éducation sexuelle de leurs enfants. « Je pense que les parents, en général, sont de plus en plus sensibilisés et conscientisés à l’impact qu’ils peuvent avoir [sur le développement de] leurs enfants de ce côté-là. »

« C’est un sujet qui peut parfois faire peur », admet Mme Lavoie-Dugré. Elle remarque un besoin d’encadrement chez des parents soucieux « d’aborder ces sujets-là de la bonne façon tout en respectant leurs propres limites. »

0-5 ans

Alors que plusieurs parents attendent la préadolescence pour aborder ces thèmes, la sexologue-psychothérapeute insiste sur le fait que « l’éducation sexuelle doit être intégrée dans le tout de l’éducation de l’enfant. »

« Il ne sera pas question des mêmes approches que lorsque l’on parle d’éducation sexuelle pour les plus vieux enfants ou pour les adolescents », pondère-t-elle. Elle maintient toutefois qu’il s’agit d’un âge « où on a la possibilité comme parent d’établir une base » qui aura un impact à long terme sur son enfant.

Le bon vocabulaire

Pour cette jeune tranche d’âge, l’éducation sexuelle commence par l’usage « des vrais termes pour parler des organes génitaux », explique Mme Lavoie-Dugré. « Souvent, les parents utilisent des mots inventés. Ça envoie comme message à l’enfant qu’il y a quelque chose de bizarre avec cette partie de leur anatomie. Ça crée un tabou. »

La sexologue-psychothérapeute nous explique qu’il s’agit d’une pratique fondamentale pour « donner la possibilité à son enfant d’avoir un vocabulaire adéquat et lui permettre de bien s’exprimer si jamais il lui arrive quelque chose concernant sa santé physique. »

Réactions 

La création de tabous par l’usage de mauvais termes et l’évitement de certaines questions concernant le développement psychosexuel de son enfant peut engendrer deux grandes réactions chez l’enfant, selon Mme Lavoie-Dugré. « Soit il va provoquer davantage un comportement réprimandé sans justification, [par exemple se toucher en public], pour tenter de comprendre. Soit il va complètement éviter le comportement et se refermer [ce qui pourrait] contribuer à alimenter le malaise de l’enfant par rapport à sa sexualité en grandissant. »

« Ça peut aussi faire en sorte que le lien de confiance [parent-enfant] ne s’établisse pas par rapport à ce sujet-là », poursuit Mme Lavoie-Dugré. Selon elle, l’éducation sexuelle des enfants dès leur plus jeune âge permettrait de fonder les bases d’un dialogue ouvert plus tard dans leur développement, notamment à l’adolescence. « Comme parent, ça permet également de donner une information qui est juste. »

Le rôle des parents

Mme Lavoie-Dugré invite les parents à utiliser des ressources, comme des albums de conte traitant de l’éducation sexuelle des enfants, pour établir une ouverture dans ce dialogue.

Elle ajoute : « l’idée n’est pas de demander aux parents d’être experts en matière de sexualité. Leur devoir est de reconnaître qu’ils agissent à titre de modèle pour leurs enfants. » En reconnaissant leur influence sur le développement psychosexuel de leurs enfants, les parents remplissent déjà une majeure partie de leur rôle, assure-t-elle.

« l’éducation sexuelle doit être intégrée dans le tout de l’éducation de l’enfant. » – Virginie Lavoie-Dugré

À éviter?

Mme Lavoie-Dugré poursuit en exposant qu’il n’y a pas nécessairement de comportements affectifs à éviter avec son enfant, par exemple les baisers et les accolades. Plutôt, il s’agit « de porter attention aux réactions » pour adresser les moments de malaise et respecter les limites de l’enfant. 

L’éducation sexuelle des jeunes enfants se fait d’ailleurs par cet établissement de limites, nous indique la sexologue-psychothérapeute. Elle nous explique que lorsque le parent respecte les frontières affectives de son enfant, cela lui renvoie le message lui indiquant que tout le monde devrait faire preuve du même respect à son égard. Il serait ainsi potentiellement plus à l’aise de dénoncer une situation où ses limites seraient franchies.