Joël Boucher et l’éducation

Joël Boucher estime que l’école québécoise va mal. Le Montarvillois, qui a été enseignant pendant plusieurs années, lance un cri d’alarme à qui veut bien l’entendre, à commencer par le nouveau ministre de l’Éducation, Bernard Drainville.

« Si Bernard Drainville me donnait une heure de son temps, il serait étourdi! », déclare Joël Boucher, lors d’une longue entrevue accordée au journal Les Versants.

« Ce n’est pas une réforme dont nous avons besoin, mais d’une révolution! » -Joël Boucher

À la retraite, Joël Boucher souhaite faire de l’éducation une priorité au Québec. Récemment, il a acheminé une longue missive à M. Drainville. « C’est en lui écrivant qu’il m’est venu à l’esprit que désormais, au crépuscule de ma vie – lorsqu’on est à la retraite, c’est ainsi qu’on se voit –, je vais me consacrer à ce que l’éducation soit au sommet de nos priorités dans la société québécoise », annonce Joël Boucher.

Ministres de l’Éducation

S’il était ministre de l’Éducation, Joël Boucher amorcerait son mandat avec trois mesures. Il abolirait le bulletin chiffré. Des repas seraient servis tous les jours aux enfants. Puis tout serait payé si tu choisis l’éducation.

Il se dit « profondément déçu » du travail effectué par le précédent ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge. « Pourtant, il a été un excellent professeur. J’ai toujours rêvé d’un ministre issu du milieu. C’est arrivé… mais ça n’a pas été concluant. Nous ne sentions jamais d’empathie de ce ministre », note Joël Boucher, qui « nous souhaite vivement un sommet sur l’éducation ».

Or, une série de forums citoyens seront organisés au printemps par le mouvement citoyen Parlons éducation afin d’échanger sur le système d’éducation québécois. « J’y serai, c’est certain! », s’empresse de dire M. Boucher.

Un voyage en Finlande

Il y a quelques mois, Joël Boucher effectuait un séjour en Finlande afin de visiter des écoles. Il en est revenu la tête pleine d’idées et de projets pour transformer le système d’éducation. Mais aussi, il en est revenu estomaqué de constater à quel point l’éducation n’était pas une priorité au Québec comparé à ce pays scandinave. Au point de se demander ce qui cloche ici.

En entrevue, il compare les deux systèmes. « Au Québec, on enseigne pour évaluer l’enfant. En Finlande, on enseigne pour éduquer et apprendre dans la progression. Là-bas, le rythme de chacun est respecté plutôt que de lui imposer des évaluations à dates fixes et des bulletins chiffrés. Un apprentissage sans stress ni stigmatisation. »

Il propose aussi d’envoyer une délégation d’enseignants et de directeurs sur place quelques mois. « Partez trois mois et revenez avec des pistes de solution à mettre en place! »

« À la suite de ce détour par Helsinki [capitale de la Finlande], j’ai pu voir combien l’école et l’enseignant sont la priorité nationale des Finlandais. Sont-ils parfaits à cet égard? Non, mais ils sont à mes yeux ce qui se rapproche le plus de la perfection. Les raisons sont multiples », illustre celui qui a été conseiller municipal à Saint-Bruno au cours des dernières années.

Au cœur de ses rencontres avec des acteurs de l’école finlandaise, M. Boucher retiendra notamment les propos de l’enseignante Erja Schunk, qui lui dira que le bonheur des enfants et du personnel prime sur le reste. « Ce ne sont pas les heures passées en classe qui déterminent la réussite des élèves, mais plutôt nos efforts pour que les enfants et les adultes soient heureux d’y être, un milieu de vie pour développer des passions. »

Ou la métaphore du Québécois Jean-Philippe Payette, qui enseigne à Helsinki depuis huit ans. « Le métier d’enseignant n’est ni un marathon, ni un sprint, mais une marche en forêt avec les élèves. » Une « image forte » selon M. Boucher.

Abolir le bulletin… chiffré

De retour au Québec, il décrie la nocivité du bulletin chiffré. Document qui n’existe pas dans les écoles de la Finlande. Du moins, lors du passage au primaire des enfants. Bulletin chiffré qu’il qualifie d’ailleurs de « l’éléphant dans la classe! ». D’après ses dires, le jeune élève québécois aura obtenu quelque 200 notes chiffrées à la fin de son séjour au primaire. « Ça développe l’anxiété, la panique, autant pour l’enfant que pour l’enseignant. »

M. Boucher poursuit en répétant à plusieurs occasions que l’enseignement est la profession la plus importante. En Finlande, l’enseignant est respecté au même titre que le médecin. Ce sont quelque 6000 étudiants qui postulent à l’université afin d’enseigner. Seuls 10 % de ceux-ci seront acceptés. « Nous sommes 50 ans derrière la Finlande sur l’importance que nous accordons aux enseignants, déplore-t-il. Ce n’est pas une réforme dont nous avons besoin, mais d’une révolution! »

Mais Joël Boucher garde espoir… et rappelle que lors de son discours à la suite de sa victoire aux plus récentes élections provinciales, le Premier ministre François Legault a déclaré qu’il faisait de l’éducation et des enfants sa priorité.