Des statistiques raciales pour le SPAL
Le rapport des activités 2023 du SPAL aura été l’occasion de regrouper des données statistiques sur les interpellations et les interceptions en fonction de la couleur de peau des individus, une première au Québec.
Le bilan des activités de la dernière année du SPAL a présenté pour la première fois des « données statistiques concernant l’appartenance raciale perçue ou présumée des personnes faisant l’objet d’une interpellation policière », comme on peut le lire dans le rapport.
Ainsi, il est possible de voir quels sont les individus interpellés en fonction de leur couleur de peau chaque mois.
On peut donc lire que pour le mois de janvier 2023, 88 Blancs ont été arrêtés, 15 Noirs, 0 Autochtone, 3 Latino-Américains, 0 Asiatique, 0 Oriental, 16 Arabes, 0 autre et 0 inconnu.
Obligation judiciaire
En 2020, le Tribunal des droits de la personne avait condamné deux policiers du SPAL ainsi que la Ville de Longueuil à une amende de 12 000 $ pour « profilage racial » contre un conducteur noir qui avait été arrêté et contrôlé en 2012 « sans motif sérieux ni raisonnable » alors qu’il emmenait son fils à la garderie. « Il y a eu deux éléments qui nous amènent aujourd’hui à compiler les interpellations policières de cette manière. Le premier, c’est le jugement du tribunal qui nous obligeait à le faire, mais aussi maintenant, le ministère de la Sécurité publique, qui a une directive pour chacune des organisations policières au Québec de faire les compilations des interpellations policières depuis le 1er avril 2024 », d’indiquer le directeur du SPAL, Patrick Bélanger, que le journal a rencontré.
Depuis 2021, la Ville de Longueuil publie annuellement ses statistiques sur son site Internet, comme l’a ordonné le tribunal. Cette année, le SPAL a décidé de les mettre dans son bilan annuel. Il n’y a aucune obligation de rendre ces informations publiques. « On l’a fait par transparence, pour que la population puisse voir quelles sont nos statistiques », d’annoncer le directeur, qui précise faire partie de « la première organisation policière à faire la compilation de ces données ».
Profilage racial
L’objectif du ministère de la Sécurité publique, qui impose depuis le 1er avril 2024 d’avoir ces informations des corps policiers, est de montrer qu’il n’y a pas de profilage racial au sein de la police. « Pour nous, on n’y voit aucune réserve à le démontrer parce que justement, c’est pour faire la démonstration qu’à l’intérieur de nos interventions, nos interpellations, il n’y a pas objet à discrimination et profilage. »
Le directeur ne « se met pas la tête dans le sable, il y a du profilage racial dans certaines occasions, mais ce n’est pas systémique, ces données pourront le démontrer. Ces statistiques portent sur toutes les interpellations. Les arrestations ne sont pas compilées. Rappelons que lors d’une interpellation, il n’y a pas de sanction. »
Pas parfaites
Pour le directeur du SPAL, ces données ne sont pas parfaites, sachant qu’elles sont prises selon la perception du policier. « On ne demande pas à la personne interpellée de quelle souche culturelle elle vient. Cela serait malvenu. Cette information est basée sur la perception du policier. Oui, il y a une sensibilité à avoir, j’en conviens, mais il y avait une forte pression de compiler nos données sur nos interpellations.
Mais c’est une première mouture qui nous permet d’être encore plus transparents. Je prédis que cette compilation va se moduler au fil des années pour avoir plus de justesse. »
À la suite de chaque interpellation, les agents de police doivent compléter un document où la perception des origines ethniques de la personne figurent désormais. « Nos agents sont très bien formés au SPAL à cet effet. Pour la fiche d’interpellation, une formation est donnée à tous les policiers du Québec. On a au sein de l’organisation le programme immersion, que le SPAL a lancé. On a les capsules de formation de l’école nationale de police du Québec, on a eu une formation qui a été donnée à l’ensemble de l’organisation policière sur une journée complète… Le SPAL est l’organisation policière qui fait le plus d’efforts à cet effet-là », rappelle M. Bélanger.
Même si ce dernier reconnaît que le profilage racial existe dans son organisation, il précise que cela doit être le cas « dans une infime minorité de situation. Avec plus de 30 ans d’ancienneté dans la police, je n’ai jamais été en présence d’une intervention qui a été basée sur une couleur de peau, une religion ou encore une souche ethnique ».