Le projet de loi 31 mal accueilli par les organismes de la région

Les organismes de défense des droits des locataires de la région accueillent mal l’arrivée du projet de loi 31. Alors que la crise du logement frappe la province de plein fouet, ils craignent que la situation des locataires empire. 

« Malheureux ». C’est ainsi que Marco Monzon, directeur général au Comité logement Rive-Sud, décrit le projet de loi 31 déposé le 9 juin par la ministre de l’Habitation, France-Élaine Duranceau.

Cession de bail

Marco Monzon dénonce qu’il existe très peu de mécanismes disponibles aux locataires pour se protéger des augmentations abusives. La cession de bail permet aux habitants d’un logement de céder leur bail au prochain locataire, qui reprend le logement au même loyer. Le projet de loi 31 prévoit de permettre aux propriétaires le droit de refuser une cession de bail. Actuellement, le propriétaire ne peut refuser de consentir à une cession de bail sans motif sérieux.

Devant ce projet de loi, Marco Monzon signale que « le peu d’outils que les locataires ont, la CAQ veut les éliminer ». Hanh Lam, coordonnatrice du Comité Logement Montérégie est du même avis. Elle affirme que la cession de bail est la seule possibilité pour les locataires, en vertu du Code civil, pour se protéger d’une augmentation de loyer abusive.

Le parc locatif du Québec connaît une hausse des prix significative, et la Montérégie n’y échappe pas. Hahn Lam craint que le projet de loi 31 vienne aggraver la situation qui est déjà critique. « Il y a déjà une flambée des prix ». Avec le projet de loi 31, il y aura « énormément de gens qui vont avoir des difficultés à se loger ». 

Déplacement du fardeau de la preuve

Le projet de loi 31 prévoit déplacer le fardeau de la preuve vers le propriétaire dans les cas d’éviction ou de reprise de logement. 

Marco Monzon reconnait la volonté du gouvernement d’éviter l’augmentation du nombre de reprises de logements. Toutefois, Hanh Lam souligne que « ça ne changera rien au problème ». Elle signale que certains propriétaires vont effectuer des travaux d’entretien sommaires pour justifier une éviction ou une augmentation des loyers. Elle alerte que certains logements n’ont pas été entretenus depuis des années. Elle craint que certains propriétaires effectuent des travaux d’entretien mineurs et augmentent le prix du logement comme si celui-ci avait été refait à neuf. 

« Le peu d’outils que les locataires ont, la CAQ veut les éliminer ». – Marco Monzon

Solution?

Les organismes défendent que la seule porte de sortie à l’augmentation abusive des loyers soit la mise en place d’une mesure de contrôle des loyers par le gouvernement. « C’est la seule façon de garder un loyer bas pour les locataires », affirme Hanh Lam. Marco Monzon est du même avis. Le contrôle des loyers est, selon lui, la seule façon de protéger les locataires des augmentations abusives des loyers qui sont déjà en hausse. 

À quelques jours du 1er juillet, Marco Monzon estime que les gouvernements doivent agir davantage. Il invite les citoyens à communiquer avec leur élu pour leur faire part de leur situation.

Des tensions

Devant les propos de la ministre Duranceau, Marco Monzon dénonce « la déconnexion du gouvernement provincial » envers la crise du logement. Cela illustre un « certain mépris de la ministre envers les locataires ».

En entrevue avec Noovo, la ministre France-Élaine Duranceau avait mentionné au sujet des cessions de bail, « Tu ne peux pas utiliser un droit qui n’est pas le tien de céder un bail, quand ce n’est pas ton immeuble. Le locataire qui veut faire ça, qu’il investisse en immobilier. » Des paroles sur lesquelles la ministre est revenue lors d’un point de presse. « J’ai dit ça et je suis désolée si ç’a paru insensible, j’étais dans une description juridique et économique des choses. Au contraire, je suis très sensible à ce qui se passe en matière d’habitation ».

En entrevue avec Patrice Roy sur les plateaux de Radio-Canada, Mme Duranceau explique que le projet de loi c’est l’un des outils qui est mobilisé pour enlever les irritants et ainsi, créer un contexte favorable pour construire davantage de multilogements et inciter les gens à investir en immobiliser. Elle atteste que ce projet de loi « agit des deux côtés », soit du côté des locataires et des propriétaires. Elle affirme qu’à la reprise des travaux parlementaires, il y aura des consultations sur le projet de loi. Au sujet des cessions de bail, Mme Duranceau déclare, « On va écouter à l’automne, mais c’est une mesure qui est pertinente ».

Le projet de loi 31 en détail

Avec le projet de loi 31, le fardeau de la preuve est déplacé vers les propriétaires lors d’éviction. Lorsqu’un locataire n’atteste pas un avis d’éviction, le projet de loi 31 considéra qu’il est contre.

En cas d’éviction, le projet de loi clarifie le montant qui devra être versé, soit un mois de loyer par année d’occupation pouvant aller jusqu’à un maximum de 24 ans. Le propriétaire devra également dédommager les coûts de déménagement.

Le projet de loi 31 prévoit apporter des modifications à la Clause F qui permet aux propriétaires d’augmenter le loyer des logements neufs durant une période de grâce de cinq ans. Ces derniers devront préciser dans le bail les hausses maximales possibles pour cette période. 

Le projet de loi 31 permettra aux locateurs de mettre fin aux cessions de baux.