Des employés venus de loin

Par manque de main-d’œuvre, Chantale Bédard déniche de nouveaux employés à l’étranger, à 10 000, parfois à 13 000 km de distance. 

« J’ai misé sur les travailleurs étrangers! Il manque de main-d’œuvre, mais il y a plus d’emplois disponibles qu’avant la pandémie de COVID-19. Pas le choix de passer par l’immigration », plaide l’entrepreneure.

Chantale Bédard possède cinq restaurants McDonald’s, dont celui au coin de la rue Montarville et du chemin De La Rabastalière, à Saint-Bruno-de-Montarville.

« J’ai misé sur les travailleurs étrangers! » – Chantale Bédard

Ainsi, elle recrute de nouveaux travailleurs aux Philippines, à Haïti, au Maroc, au Cameroun, ailleurs aussi en Afrique… des gens – des hommes, des femmes – qui veulent travailler pour une chaîne de restauration rapide du Québec. « En majorité, ce sont des hommes qui postulent. Quelques femmes aussi. Lorsqu’on les embauche, c’est un contrat de 24 à 36 mois, renouvelable. Leur famille vient les rejoindre. Ils ont l’objectif de devenir résidents permanents. Pour eux, c’est un projet de vie, venir travailler ici », explique Chantale Bédard.

Le processus d’embauche est long. Plusieurs mois, voire une année, avant qu’elle les accueille au Québec. Avant leur arrivée, elle leur trouve un logement. Une initiative qu’elle répète depuis maintenant sept ans, mais qui s’est intensifiée au cours des deux dernières années.   

Témoignage  

Nezha travaille au McDonald’s de Saint-Bruno-de-Montarville depuis trois semaines. Elle et son mari, Aymene, arrivent du Maroc. Ils ont été embauchés par Mme Bédard à la suite d’un processus de plusieurs mois. Les premiers contacts ont été établis avec la responsable des ressources humaines de l’entreprise, Soukaina Zougar. 

À Casablanca, ils étaient déjà à l’emploi de McDonald’s. « Je cherche des gens avec de l’expérience en restauration et en gestion aussi », dira la franchisée en entrevue. Au Maroc, Nezha et Aymene occupaient des postes de 2e assistant junior. Au Québec, ils sont chefs de quart. « Je suis venue ici pour améliorer mes conditions, pour une meilleure vie, pour moi et ma famille. Pour une meilleure éducation aussi. Au Maroc, il y a peu d’avancement », mentionne la jeune femme de 25 ans.

Depuis son arrivée, elle a visité Montréal pendant la Nuit blanche. Le trajet s’est déroulé en autobus et en métro. « Montréal est très jolie », dit-elle. Quant à Saint-Bruno-de-Montarville, où le couple demeure depuis son arrivée, c’est un endroit « très calme, tranquille; une belle ville! ». Toutefois, on parle de deux mondes différents. « Ici, c’est très tranquille. Casablanca, c’est une ville du travail! »

Manque de main-d’œuvre

Au cours des derniers mois, il n’a pas été rare que des clients se soient cogné le nez sur la porte d’entrée d’un commerce fermé « par manque d’employés ». La situation s’est répétée à quelques reprises au McDonald’s du centre-ville montarvillois l’automne dernier. La superviseuse de marché du McDonald’s Saint-Bruno confiait alors au journal Les Versants que son problème était le manque d’employés à temps plein. Non seulement il y avait pénurie de ce côté, mais l’employeur devait aussi pallier le manque d’étudiants. Ce qui n’était pas le cas auparavant. « C’est le plus gros problème. Il n’y en a plus, des étudiants qui travaillent. »

Des propos semblables que reprend Chantale Bédard six mois plus tard. « La tranche 16-20 ans a disparu. »

Au moment d’écrire ces lignes, la femme d’affaires est en route pour l’aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau, à Montréal. Elle s’en va accueillir des Philippins. Ils iront travailler dans un autre restaurant de la franchisée. Puis, cette semaine, un autre viendra se greffer à l’équipe de Saint-Bruno, et ainsi de suite… En tout, 70 travailleurs étrangers feront le voyage vers le Québec au cours des prochains mois, recrutés par Chantale Bédard, dont 10 nouveaux employés pour le commerce situé au 1500, rue Montarville. « Le but sera toujours d’embaucher des gens au Québec. C’est plus rapide et moins dispendieux. Recruter des étrangers, il y a des coûts rattachés et c’est long. Si l’on veut continuer d’avoir des employés… »

Des coûts

Mais cette initiative n’est pas gratuite. Au contraire. Chaque nouvel employé trouvé à l’étranger coûte 10 000 $ à la femme d’affaires. Pour les frais de visa, de permis, le billet d’avion… Uniquement pour son restaurant de Saint-Bruno, Chantale Bédard déboursera 100 000 $ pour de nouveaux arrivants. Mais en bout de ligne, c’est un investissement, dit-elle. « Au lieu de réduire mes heures d’ouverture, d’épuiser mon staff ou de gérer un roulement élevé d’employés, je vais avoir un taux de roulement plus bas, je vais aller chercher une stabilité, extensionner mes heures d’ouverture, servir plus de clients et, éventuellement, augmenter mon chiffre d’affaires! »