Une plainte contre le gouvernement pour protéger une espèce menacée à Sainte-Julie

L’Union des municipalités du Québec (UMQ) lançait aujourd’hui une « plateforme ambitieuse pour le climat. » En même temps, la mairesse de Sainte-Julie était confrontée, dans sa municipalité, à un Comité citoyens voulant empêcher un projet immobilier encouragé par la Ville dans un boisé où se trouvent des espèces florales protégées.

Un groupe de citoyens réunis sous le comité Sauvons le versant de Sainte-Julie du mont Saint-Bruno, s’inquiète depuis 2020 d’un projet immobilier autorisé par Sainte-Julie. La construction est envisagée dans un boisé collé au mont Saint-Bruno, dans le quartier du Domaine des Hauts-Bois. Le boisé en question jouxte un autre boisé protégé par Nature Action Québec (NAQ). L’autorisation du ministère de l’Environnement pour permettre la construction de 15 maisons de luxes à cet endroit a été donnée, même si le Comité a fait la preuve qu’une espèce végétale en voie de disparition y était présente.

Pour freiner la destruction du boisé qui semble abriter des espèces végétales normalement protégées par la loi, le Comité de citoyens s’est enjoint les services des avocats partenaires du Centre Québécois du Droit de l’Environnement pour une action en justice contre le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les Changements climatiques (MELCC) afin d’annuler l’autorisation délivrée par le MELCC validant le projet. La plainte déposait le 7 avril, devant la Cour Supérieure, « serait une première au Québec de demander au tribunal de se prononcer sur cette question », précise au journal Me Marc Bishaï, avocat du Comité citoyens dans ce dossier.

« Nous dénonçons que nos responsables du bien commun refusent toujours de prendre les actions qui s’imposent pour préserver ce versant de la montagne, si cher aux citoyens et si important pour la préservation de la biodiversité. Prenant acte de ce manque de volonté politique et de cette menace imminente d’atteinte à l’environnement, nous avons décidé d’agir », affirme quant à elle Sonia Pépin, résidante de Sainte-Julie et membre du Comité.

L’objectif du Comité est d’agir rapidement. Le 9 mars, la Ville de Sainte-Julie émettait un appel d’offres afin d’effectuer des « travaux de construction d’infrastructures au Projet place de la Falaise. » Un appel d’offres qui consisterait  à des travaux de déboisement, d’excavation, de dynamitage du roc pour l’aménagement d’infrastructures pour le projet des 15 maisons. La date limite du dépôt des candidatures est le 15 avril, par la suite les travaux devraient commencer rapidement.

« Nous dénonçons que nos responsables du bien commun refusent toujours de prendre les actions qui s’imposent pour préserver ce versant de la montagne, si cher aux citoyens et si important pour la préservation de la biodiversité. » – Sonia Pépin

Pas de commentaire de la Ville

Le journal a contacté la mairesse de Sainte-Julie, mais la Ville, qui est mise en cause dans cette plainte,  a indiqué qu’aucun commentaire ne sera émis « car le dossier est judiciarisé. » Rappelons que l’UMQ, présidée par Suzanne Roy, mairesse de Sainte-Julie, a lancé aujourd’hui, la Plateforme municipale Unis pour le climat, en présence de plus de 200 élus et gestionnaires municipaux de partout au Québec, ainsi que des représentants d’organismes économiques, environnementaux, sociaux et communautaires. Dans un communiqué Mme Roy indique que « la Plateforme de l’UMQ est ambitieuse. C’est une première dans le milieu municipal. Avec cette Plateforme, on veut encourager les municipalités à poser des gestes concrets pour répondre au défi climatique. La pandémie ne doit pas éclipser la crise climatique. C’était un enjeu prioritaire, c’est un enjeu qui est toujours prioritaire. Tout le monde doit se mettre en action, maintenant! »

Me Bishai, indique cependant que les Villes « ont des moyens légaux disponibles pour protéger les espèces naturelles. »

Injonction

À la plainte adressée à l’encontre du ministère de l’Environnement, le Comité y a joint une demande d’injonction afin qu’aucun geste ne soit entrepris d’ici la décision de la cour. Des actions qui pourraient mettre en danger l’espèce végétale protégée. « Le défendeur a autorisé des transplantations de spécimens de l’Espèce sous prétexte que ces transplantations seraient « requises pour des fins de gestion » de l’Espèce au sens de l’article 16 al. 2 (3o) Loi sur les espèces menacées ou vulnérables (LEMV), alors que les autorisations sollicitées étaient demandées explicitement pour les fins d’un projet domiciliaire qui détruira le milieu naturel initial de l’Espèce », peut-on lire dans le requête.

Même si l’action en justice vise le ministère de l’Environnement, Me Bishai souligne l’empressement de la Ville de Sainte-Julie à vouloir procéder. « La demande de soumissions publique de la Ville prévoit la fin de la transplantation au plus tard le 1er juin 2021, suivie d’un déboisement pendant 10 jours et d’autres travaux lourds sur les Terrains. La date butoir pour la demande de soumissions publique est le 15 avril 2021. Les demandeurs soulignent le contraste entre, d’une part, le ton rassurant de la Ville durant les mois de juillet 2020 à février-mars 2021 quant à un projet « éventuel », non déposé, non officiel, non autorisé, et d’autre part, un certain empressement le 9 mars 2021 de publier la demande de soumissions publique le jour précédant la vente au promoteur, et les échéances des 15 avril et 1er juin 2021. »

L’espèce protégée l’est non seulement par la loi provinciale mais aussi sur le plan fédéral avec la Loi sur les espèces en péril (LEP). Cette loi interdit de nuire aux individus de cette espèce, d’en posséder, d’en faire le commerce et de perturber leur habitat. Des mesures de protection sont aussi mises en place au niveau international dans la Convention  sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES), afin de contrôler les exportations.

Le boisé des Hirondelles

Rappelons qu’à proximité de là, à Saint-Bruno-de-Montarville, dans un boisé collé également au mont Saint-Bruno, la même espèce végétale protégée bloque toujours la construction de plusieurs maisons dans le boisé des Hirondelles. Le promoteur de la société Sommet Prestige, le sénateur Paul J. Massicotte, s’est vu refuser par le ministère de l’Environnement le droit d’aller de l’avant pour l’instant dans son projet.

La situation est cependant différente à Sainte-Julie. Le ministère de l’Environnement a déjà délivré son autorisation de construire dans cette zone. D’autre part, la Ville, qui a fixé des conditions au respect de l’environnement si un promoteur voulait développer l’endroit, est plutôt favorable au développement immobilier de ce secteur, à la différence de la Ville de Saint-Bruno concernant le boisé des Hirondelles.

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