Aimer plus d’une personne pour sauver son couple
Après des années de trahisons et de tromperies au sein d’une « monogamie toxique », un couple de la Rive-Sud, marié depuis 20 ans, a choisi de se tourner vers le polyamour pour sa survie. Une décision qui s’avère pour les deux membres une « libération », voire un « cadeau ».
« Quand je repense à mon passé, je devais être polyamoureuse dans mon cœur, sans jamais rien n’avouer», indique Lou*, 47 ans, lorsque rencontrée par Les Versants à son domicile de Longueuil. « Je ne porte pas de jugement sur la monogamie. Il y a sûrement des gens pour qui ce n’est pas toxique », réplique pour sa part son époux Dan*, 63 ans, convaincu que le polyamour lui sied davantage que la monogamie.
« Les papillons, ça ne peut pas durer tout le temps. » – Dan
L’organisme Polyamour Montréal décrit le polyamour comme « une orientation relationnelle dans laquelle les individus ont des relations amoureuses avec plus d’une personne, de façon simultanée, avec le consentement et la connaissance de toutes les personnes concernées ».
Pour Dan et Lou, c’est cette nouvelle orientation qui guidera désormais leur couple. Ils ont choisi depuis peu d’adopter cette philosophie, soit depuis cette soirée qu’ils appellent le « coming out du 9 janvier 2020 ». Bien que cette décision soit récente, ils sont déjà convaincus que le polyamour respecte davantage leur vision de l’amour.
Lou, visiblement émue, raconte : « J’ai pensé longtemps que Dan était la seule personne qui pouvait me compléter. Mais je n’ai pas à être complétée. Je suis une femme entière. Mais j’ai mis la femme, l’amoureuse et l’amie de côté trop longtemps. C’est la mère qui a pris le dessus. » « Les papillons, ça ne peut pas durer tout le temps. C’est chimiquement impossible », soutient de son côté Dan, qui malgré ce constat, assure être toujours amoureux de son épouse.
Impossible
Quelques jours avant Noël, Lou sait que le statu quo dans son couple, qui la rend malheureuse depuis trop longtemps, ne peut plus durer. Elle doit trouver le courage de parler à Dan durant le temps des Fêtes, mais n’y arrive pas. Puis, elle tombe par hasard sur une entrevue à la radio où sexologues et psychologues laissent entendre qu’être amoureux de plus d’une personne, c’est possible.
« Tous les mots qui sont prononcés dans cette entrevue-là, c’est exactement les mots que je voulais dire à Dan. Plutôt que de lui faire une déclaration, je lui fais écouter l’entrevue et je lui annonce : ‘’C’est ce que je souhaite’’. » Le soulagement de Dan est instantané : « J’ai été bouleversé quand elle me l’a dit. C’était un cadeau. Je vais voir ma compagne être heureuse, et moi aussi être heureux? »
Le couple décide donc de se lancer dans le monde du polyamour, équipé bien sûr de quelques règles élémentaires : le noyau familial doit toujours être la priorité – ils ont ensemble deux enfants de 14 ans et 7 ans – et ils doivent être parfaitement honnêtes en ce qui concerne les gens qu’ils rencontrent et les lieux où ils se trouvent.
Depuis leur « coming out », les deux polyamoureux utilisent différentes applications de rencontre pour aborder d’éventuelles conquêtes. En riant, Lou lance : « C’est moi qui ai créé le profil Tinder de Dan !»
La tête avant le corps
Mais être polyamoureux ne signifie pas pour autant multiplier les conquêtes sexuelles, d’insister Lou : « C’est sûr qu’il y a plein de gens sur les applications que ce qu’ils cherchent, c’est un plan cul. Mais moi, ce n’est pas ça que je veux. Moi, je veux que tu m’allumes dans ma tête en premier. »
Bien que la conversion au polyamour soit récente, Lou dit déjà fréquenter trois personnes, dont deux pour qui elle reconnaît avoir des sentiments. Pour sa part, Dan a rencontré une autre personne qui le fait vibrer.
Lequel de ces amoureux, donc, aura le privilège de passer la Saint-Valentin avec Dan et Lou? « Comme toujours, nous fêterons avec les enfants et honorerons l’amour familial! La simplicité et l’authenticité sont des valeurs que notre famille met de l’avant. Les fêtes commerciales, c’est pas trop pour nous, puisque l’amour est fêté au quotidien », explique Lou.
Pour Polyamour Montréal, qui a notamment comme mission de représenter et rassembler les personnes polyamoureuses, la situation vécue par Dan et Lou n’est pas particulièrement surprenante. « Certaines personnes se tournent vers le polyamour pour des raisons similaires. D’autres ont toujours eu des relations multiples », fait remarquer Éloïse Lapointe Leblanc, présidente de l’organisme sans but lucratif.
L’organisme, créé en février 2017, compte une cinquantaine de membres actifs. Quelque 3000 sympathisants sont également abonnés à sa page Facebook.
*Dan et Lou ont préféré taire leur nom de famille, car plusieurs membres de leur entourage n’ont pas été mis au courant de leur nouvelle orientation relationnelle.
Question aux lecteurs : Connaissiez-vous le polyamour?