Une route "écologique" à Saint-Bruno-de-Montarville

La route de la montée Sabourin entre Grand Boulevard et Seigneurial à Saint-Bruno-de-Montarville a subi une transformation en profondeur. Dans cette reconstruction, l’environnement a été au cœur des préoccupations de la municipalité.
La route traversant un milieu boisé était étroite et dangereuse, non seulement pour les automobilistes et les cyclistes, mais aussi pour la faune avoisinante. Cette dernière ne pouvait que se risquer à se frayer un passage à travers la circulation.
Aujourd’hui, après l’ajout d’une traverse faunique au moment de la réfection de la rue, les animaux pourront passer d’un boisé à l’autre en toute sécurité en empruntant un tunnel ajouré se trouvant au niveau de la couche d’asphalte, pour laisser la lumière passer.
« L’ajout d’une traverse faunique a pour but de connecter les milieux naturels environnants de grande valeur. Cette initiative a été accueillie très favorablement par le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) lors de son analyse du projet en vue de l’émission de l’autorisation pour les travaux », indique la direction du Génie de la Ville.
La traverse a été distribuée par le fabricant ACO. Il est possible de voir ce genre d’installation en Ontario, en Europe ou encore aux États-Unis, mais au Québec, la chose semble rare.

Le tunnel

La traverse est constituée d’un tunnel perforé en surface afin de laisser la lumière y entrer. Ce tunnel est bétonné et est installé au niveau de la surface du pavage. De petites clôtures sont installées de part et d’autre du tunnel afin de guider la faune vers les entrées. Cette traverse faunique est prévue pour la petite faune.
En empruntant ce chemin, le passage se voit facilement, et sur les abords de l’entrée des passages, les petites clôtures sont tout aussi visibles.
La municipalité précise qu’« une deuxième traverse faunique a été installée plus au nord. Il s’agit uniquement d’un ponceau circulaire de 600 mm qui a été installé au travers de la chaussée afin de permettre le passage de la plus grande faune (ratons, lièvres, etc.) »
Le coût total des travaux a été de 30 000 $. La traverse de la petite faune a coûté 26 000 $, et 4 000 $ pour la deuxième traverse facilitant le passage d’une plus grande faune. « L’aménagement des traverses correspond à 1,5 % de la valeur des travaux », rappelle la Ville, des travaux d’un coût de 1,7 million de dollars.

ACO

C’est l’entreprise américaine ACO qui a été contactée pour construire la traverse. Cette dernière a une base canadienne en Ontario.
ACO est spécialisée dans le drainage de bâtiments. C’est ainsi que l’entreprise a eu l’idée d’utiliser son savoir-faire sur les techniques d’évacuation d’eau pour développer son système de tunnel pour les petits animaux. Le premier système de tunnel faunique a été installé en Europe et en Amérique du Nord en 1987.
« Au Québec, nous avons au moins six villes qui ont fait appel à nos services pour ce genre d’installation. On en compte deux au lac Brome, deux à La Prairie, une près de Châteauguay et une à Saint-Bruno-de-Montarville », explique Pierre Gélinas, membre d’ACO.
Il existe plus de traverses fauniques au Québec, mais pas de ce genre et pas en si grand nombre. Cependant, l’intérêt pour ces infrastructures se fait grandissant auprès du gouvernement et des municipalités.

« L’ajout d’une traverse faunique a pour but de connecter les milieux naturels environnants de grande valeur. » – Direction du Génie de Saint-Bruno

Un intérêt de plus en plus grand

Kateri Monticone, chargée de projet en sciences pour Conservation de la nature Canada, a fait le constat que le pays souhaite de plus en plus développer ce genre de projet. « Aux États-Unis, il est possible de trouver des statistiques sur les accidents routiers liés à la faune sur les routes, pas encore au Québec. Toutefois, une étude est en cours pour peut-être y remédier. » Au Québec, plusieurs expériences ont été mises en œuvre pour favoriser ce genre de passage aux animaux de tout gabarit. « La route 175 en est un exemple. Alors que la voie de circulation était refaite sur une large portion entre Québec et le Saguenay – Lac-Saint-Jean, le ministère des Transports a mis en place des clôtures et des passages pour éviter les accidents et faire traverser de manière sécuritaire les animaux. Ces actions se font plus par opportunité au Québec pour l’instant, lorsqu’il y a des travaux à faire sur une route. »
Au total, 39 passages fauniques sont en service le long de la route 175 entre Stoneham-et-Tewkesbury et le Lac-Saint-Jean, 33 pour la petite et moyenne faune (porc-épic, renard, vison, martre…) et 6 pour la grande faune (orignal, loup, ours…).

Espèces en péril

Une route peut mettre en péril certaines espèces, car leur territoire est morcelé. Là encore, la traverse faunique aura son rôle à jouer à Saint-Bruno-de-Montarville.
Le ruisseau Massé, à proximité de l’endroit, est un endroit où réside la rainette faux-grillon, une espèce en voie de disparition. Elle pourra désormais traverser sans craindre pour son existence.
Boîte info
« Stop Carcasses! »
Une application pour téléphone intelligent a été mise en place pour photographier l’endroit et le moment d’une collision avec un animal. Les données récoltées par « Stop Carcasses! » (le nom de l’application) permettront de savoir s’il y a des endroits plus propices à l’installation de traverse faunique. Cette démarche a pour mission d’améliorer la sécurité des conducteurs et de la faune.
Le projet « Stop Carcasses! » a été créé conjointement par la Fiducie foncière de la vallée Ruiter et Corridor appalachien, avec le soutien financier de la Fondation de la faune du Québec, et grâce à l’expertise partagée par nos partenaires du Vermont, soit l’organisme Cold Hollow to Canada et son programme « WildPaths ». L’application n’est pas disponible partout au Québec, mais des formations se multiplient.
Boîte info
Quelques statistiques d’animaux morts sur les routes des États-Unis chaque année :
– Un animal est percuté toutes les 26 secondes;
– Les collisions avec des animaux ont entraîné la mort de 200 personnes et blessé 26 000 autres;
– Selon des estimations, au moins un million d’animaux sont tués sur les routes par année;
– Les coûts qu’engendre la mortalité routière impliquant un animal sont de 8 milliards de dollars.