Pour ou contre un projet immobilier

Quartier Tribeca à Saint-Basile-le-Grand

Un développement immobilier de 20 maisons jumelées haut de gamme doit voir le jour au cours des prochains mois aux abords du ruisseau Massé, à Saint-Basile-le-Grand.
Rappelons d’abord les faits, qui s’amorcent en 2014, lorsqu’un promoteur acquiert des terrains à Saint-Basile-le-Grand. En collaboration avec la Municipalité, il travaille pendant deux ans pour créer et faire accepter le projet. En décembre 2016, lors d’une assemblée du conseil, les élus de l’époque autorisent un échange de terrains, entre la Ville et le promoteur, Yves Guertin. Cette signature permet un développement immobilier d’une vingtaine de maisons jumelées haut de gamme derrière le lot du 348, rue Principale, qui prendra le nom de Tribeca, une référence à un quartier en vogue à New York et dans lequel résident plusieurs personnalités. Dans l’échange, Saint-Basile-le-Grand obtenait aussi une somme de 148 000 $, attribuable à la superficie. En effet, celle appartenant à la municipalité et cédée au promoteur est supérieure à celle appartenant au promoteur et laissée à la ville. Après évaluation, le promoteur paie donc la différence entre les deux.
Grâce à cette transaction de terrains, la bande riveraine du ruisseau Massé prenait aussi de l’expansion. Le directeur général expliquait la situation en ces propos : « Nous avons un parc linéaire le long du ruisseau Massé. Celui-ci prendra de l’expansion. Ce parc (du Ruisseau) en est un naturel, sans aucune infrastructure. C’est une partie jouxtant le cours d’eau et notre parc qui permettra d’agrandir celui-ci. » Voilà pour la petite histoire.

« Ce projet ne fait pas le bonheur de trois résidants. » – Yves Guertin

Depuis, toujours dans le cadre de ce projet d’ensemble résidentiel, le conseil municipal a entériné, en mai dernier, la recommandation du comité consultatif d’urbanisme pour les noms de rues « place du Rivelet » et « place de l’Eau vive », choisis en lien avec la proximité du ruisseau Massé, qui passe non loin.
Le journal Les Versants est allé à la rencontre du promoteur, Yves Guertin, qui plaide pour la protection de l’environnement. Dans la description du projet Tribeca, disponible sur Internet, on peut entre autres lire qu’il s’agit d’un développement immobilier qui « s’inscrit dans une perspective de développement durable », que tout a été imaginé pour que « l’environnement soit le plus naturel possible; les boisés sont protégés et les fils sont enfouis. La nature occupe toute la place », et que l’esprit écologique sera respecté « afin de réduire au maximum les impacts sur la flore ».
Selon Yves Guertin, lorsqu’il sera temps de « lotisser » les terrains, deux des trois arbres qui s’y trouvent seront déplacés. « Il y a un saule que nous allons perdre », déplore le promoteur à la tête d’un projet domiciliaire d’une valeur de 12 millions de dollars. « Il n’en demeure pas moins que la protection de la bande riveraine et de la nature est importante pour moi », souligne-t-il. C’est la raison pour laquelle il promet d’investir dans le projet afin de reboiser les rives avec la Ville de Saint-Basile-le-Grand. « Je me suis engagé à payer une partie de ces frais », soutient M. Guertin, qui envisage de planter des chênes des marais, une espèce « à croissance rapide ». De passage sur le site du futur développement, le journal a pu constater que plusieurs arbres du boisé sont actuellement morts.
D’autre part, dans la conception des résidences, le promoteur promet de tirer avantage de la topographie actuelle du terrain afin de le conserver dans son état naturel. C’est l’une des raisons pour lesquelles toutes les maisons seront disponibles en rez-de-jardin.

Pas le bonheur de tout le monde

Bien que M. Guertin s’enthousiasme à propos de Tribeca, ce n’est pas le cas pour tout le monde. En effet, certains s’y opposent. Lors d’une assemblée du conseil municipal, le 3 juillet dernier, certains d’entre eux ont participé à la Parole aux Grandbasilois, manifestant leur inquiétude et leur mécontentement quant à l’arrivée de la machinerie et des futures demeures, qui seront construites à la vue de leur arrière-cour. « Je ne suis pas d’accord avec le projet de ce “prédateur financier”, avait déclaré l’un d’eux. Là où nous habitons, nous pouvons observer la nature : les chevreuils, les renards, les chats sauvages, les coyotes… L’arrivée de 20 maisons, c’est l’ajout de 40 personnes minimum, 40 voitures, 20 cours, des poteaux électriques. Nous allons perdre notre quiétude, notre bien-être, notre solitude. » Un autre citoyen avait demandé : « Pourquoi la Ville laisse-t-elle bâtir ça? Pourquoi la Ville accepte-t-elle des projets comme ça? Il faut garder le cachet, la faune, l’environnement, le son… Toutes ces choses ont des liens ensemble. » Pour le maire de Saint-Basile-Grand, Yves Lessard, « quand on est parmi les premiers occupants d’un secteur qui pourrait encore se développer, il faut s’attendre à avoir un jour ou l’autre des voisins ».
« Ce projet ne fait pas le bonheur de trois résidants qui ont tenté de s’y opposer dès le début pour des motifs personnels en utilisant le couvert de la protection de la nature », dénote M. Guertin. Entre les futures rues qui seront ouvertes, on y trouve trois propriétaires de la rue Principale cloîtrés dans le développement. M. Guertin demeure aussi sur la rue Principale, depuis quatre ans, mais déménagera dans Tribeca. Quand on lui demande s’il a déjà observé des animaux dans son arrière-cour, il répond très peu en quatre ans. « Un renard à deux reprises, quelques biches, des bernaches. Quand ils viennent de ce côté du ruisseau, c’est qu’ils sont perdus, ou qu’ils se sont aventurés trop loin du boisé. » L’homme d’affaires poursuit : « Il y a toujours des opposants à tout. Tous ont droit à leur opinion si ça les dérange. Mais quand il est toujours possible de développer, il faut s’attendre un jour ou l’autre à voir arriver de nouveaux voisins. Ils devront s’y faire et vivre avec… »
Évidemment, ce n’est pas demain que seront érigées ces nouvelles résidences. Des démarches doivent encore être entreprises avant une première pelletée de terre, mais Yves Guertin a pour objectif de livrer les premiers bâtiments l’été prochain.

« Ça nous fend le cœur »

Questionné par le journal, le Grandbasilois Richard Chartrand, propriétaire d’une maison sur Principale, mais pas cloîtré entre les deux futures rues, partage : « Il va de soi que de voir une partie du boisé à l’arrière où nous cohabitons avec des chevreuils faire place à de multiples jumelées nous fend le cœur. Ils seront nos voisins directs. Je n’ai rien contre de nouveaux arrivants, mais personnellement, j’aimerais bien une maison voisine et voir la Ville qui rachète les terrains à l’arrière pour prolonger la piste cyclable jusqu’à côté de chez nous. »
Quant aux chevreuils, M. Chartrand soutient qu’il en observe « assez souvent ».

QUESTION AUX LECTEURS :

Que pensez-vous de ce projet d’ensemble résidentiel?